En 1900, Brunhes est engagé comme directeur de l’Observatoire météorologique du Puy-de-Dôme, en Auvergne. Homme d’action, Bernard ne se contente pas de regarder les étoiles. Il profite de cette position dans cette région volcanique pour étudier le champ magnétique terrestre. Pour ce faire, il a besoin de terre cuite. Mais pas n’importe laquelle. Il lui faut une terre qui ait été recouverte par la lave d’un volcan. Car quand de la terre cuite est chauffée à des températures extrêmes puis refroidie, certains de ses électrons présents dans sa structure moléculaire deviennent des aimants fossilisés. Ces aimants offrent alors la chance unique de pouvoir lire les coordonnées du champ magnétique terrestre à cet endroit et ce moment précis !

Trouver une telle perle rare n’est pas chose facile. Mais finalement, un de ses amis lui annonce qu’il a trouvé ce qu’il cherchait sur le chantier d’une route à Pontfarin, dans la Commune de Cézens dans le département du Cantal. Ni une ni deux, Bernard emporte ses burins, grimpe sur son cheval et entreprend le voyage d’une journée au lieu-dit pour y découper un gros morceau de roche, qu’il remporte à son laboratoire. Plus de deux jours de voyage pour un bout de caillou certes, mais quel caillou !

Ce qu’il découvre est stupéfiant. Quand ce bout de terre-cuite a chauffé puis s’est refroidie, les pôles magnétiques terrestres étaient… inversés ! Ce qu’on appelle aujourd’hui le Nord magnétique était au Sud, et vice-versa. C’est une incroyable découverte scientifique pour l’époque. Mais comme souvent avec la communauté scientifique le conservatisme prudent, qui doute des possibilités physiques d’un tel phénomène, laisse peu à peu la place à un scepticisme obtus, qui se demande si la roche de Pontfarin n’est pas tout simplement fausse !

En conséquence, Bernard est bien décidé de ne plus jamais publier sur le sujet. Débordé par le travail et les recherches, il a après tout bien mieux à affaire que de descendre dans l’arène pour s’épuiser à défendre sa découverte. Il meurt seulement quelques années plus tard, à l’âge de 42 ans. Il faudra attendre une cinquantaine d’années avant que la communauté scientifique n’en viennent enfin aux mêmes conclusions que le géophysicien français. Et de considérer la roche de Pontfarin comme la première preuve que le champ magnétique nous a réservé et nous réservera demain bien des surprises.